RDC/Politique/fédéralisme de Kamitatu:Autonomie ou cadeau empoisonné ?

Tribune de Célestin Junior

Face à la proposition d’Olivier Kamitatu d’adopter une structure fédérale pour la RDC, Célestin Junior Kazadi, Coordonnateur de l’Action pour la Relève Éclairée (ARE), dresse une analyse critique et argumentée. Pour l’ARE, si l’idée d’une décentralisation accrue peut séduire, elle se heurte à des réalités congolaises complexes et porte en germe des risques majeurs pour l’unité nationale. L’heure n’est pas à une vision idyllique, mais à une évaluation lucide des fondations fragiles de la RDC.

Olivier Kamitatu agite le spectre d’un fédéralisme salvateur pour la RDC, rêvant d’une nation revitalisée par la décentralisation à l’aune des anciennes provinces. Mais derrière cette vision séduisante se cachent des réalités congolaises brûlantes, des cicatrices historiques profondes et des risques de fragmentation qui pourraient transformer ce rêve en un cauchemar pour l’unité nationale. L’heure n’est-elle pas à une lucidité implacable plutôt qu’à une chimère potentiellement fatale ?

La récente proposition de l’ancien président de l’Assemblée nationale d’embrasser le fédéralisme comme panacée aux maux de la République Démocratique du Congo ( RDC) mérite un examen sans complaisance, auquel l’Action pour la Relève Éclairée (ARE), par la voix de son Coordonnateur Célestin Junior Kazadi, entend contribuer de manière constructive mais ferme. Si l’idée d’une gouvernance plus proche, d’une gestion locale des richesses et d’une reconnaissance accrue de la diversité régionale résonne avec un certain idéal de justice et d’autonomie, elle bute violemment sur les réalités congolaises, un terrain miné par des décennies de centralisation autoritaire, de conflits intestines et d’une confiance mutuelle dangereusement érodée. Pour l’ARE, le fédéralisme n’est pas une baguette magique ; il est un édifice complexe dont la solidité dépend avant tout des fondations sur lesquelles il repose. Et en RDC, ces fondations sont-elles suffisamment robustes pour supporter un tel changement de paradigme ?

Le plaidoyer de ce collaborateur de Moïse Katumbi pour une autonomie régionale accrue, calquée sur le découpage des anciennes provinces coloniales et post-indépendance, semble dangereusement ignorer le précipice de la désunion qui guette une nation où le sentiment d’appartenance commune peine encore à s’imposer face à des identités régionales et ethniques souvent instrumentalisées.

L’histoire tragique de l’Éthiopie, un État fédéral ethnique, nous hurle la mise en garde : un fédéralisme mal conçu, basé sur des lignes de fracture identitaires profondes et dépourvu d’institutions fédérales véritablement neutres, peut rapidement dégénérer en conflits sanglants et en menacer l’existence même de la nation. La RDC, avec ses propres cicatrices ethniques et régionales, prendrait-elle le risque de réveiller ces démons en leur offrant des plateformes institutionnelles légitimes pour s’exprimer avec une force accrue ? L’ARE, à l’instar de son Coordonnateur, exprime une vive préoccupation face à cette potentielle exacerbation des divisions.

L’appât d’une gestion locale des ressources comme remède aux inégalités sonne également creux face à la gangrène de la corruption et de la mauvaise gouvernance qui ronge notre pays. Décentraliser les revenus dans un tel contexte ne risque-t-il pas de créer des potentats régionaux incontrôlables, alimentant le clientélisme et le détournement de fonds au détriment des populations locales ? Le Nigeria, avec son fédéralisme pétrolier marqué par des décennies de tensions et d’inégalités régionales, nous offre un sombre aperçu des dangers d’une décentralisation des richesses sans des mécanismes de transparence et de contrôle d’une intégrité inébranlable. L’ARE partage cette analyse et met en garde contre une décentralisation financière prématurée.

Surtout, comment envisager un fédéralisme viable avec un État central encore trop faible pour exercer pleinement ses prérogatives régaliennes sur l’ensemble du territoire ? Dans un pays où des pans entiers échappent à l’autorité de Kinshasa, où la sécurité et la justice sont encore des chimères dans de nombreuses régions, une décentralisation abrupte des pouvoirs ne risque-t-elle pas de conduire à une fragmentation de facto, où chaque entité fédérée agirait selon ses propres lois et intérêts, au mépris de toute cohésion nationale ? L’histoire récente de la RDC, marquée par des rébellions et des zones de non-droit, nous rappelle cruellement les conséquences d’un État central impuissant. L’ARE insiste sur la nécessité d’un État central fort comme garant de l’unité avant toute réforme structurelle majeure.

Alors, Monsieur Kamitatu, le fédéralisme que vous proposez est-il une bouée de sauvetage pour une RDC en quête de renouveau, ou un piège mortel qui pourrait précipiter sa désintégration ? Pour Célestin Junior Kazadi et l’ARE, l’heure n’est pas à la précipitation ni aux solutions simplistes. La RDC a besoin d’une décentralisation progressive et maîtrisée, d’un renforcement de ses institutions, d’une lutte acharnée contre la corruption et d’une véritable culture de dialogue national avant d’envisager un changement aussi radical de sa structure étatique. Rêver d’un fédéralisme idyllique sans s’attaquer aux maux profonds qui minent notre nation, c’est risquer de transformer un espoir légitime en une tragédie annoncée. L’unité de la RDC mérite mieux qu’un saut dans l’inconnu. Elle exige une vision lucide, une action concertée et une prudence inébranlable, une position que l’ARE entend défendre avec vigueur.

Célestin Junior Kazadi,
Coordonnateur de l’Action pour la Relève Éclairée (ARE).

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