RDC/Point de vue. Afghanistan:le cimetière des puissances militaires

Par Yamaina Mandala

Pays de hautes montagnes, l’Afghanistan est en voie d’écrire une nouvelle page de son histoire mouvementée. En effet, après le retrait des troupes soviétiques, les États-Unis qui étaient intervenus dans ce pays d’Asie il y a près de 20 ans, au lendemain des attentats contre les tours jumelles de New York et le Pentagone, ont décidé de retirer leurs soldats au plus tard le 31 août 2021. L’Otan va emboiter le pas en retirant aussi toutes ses troupes. A partir de cette date, la guerre froide entre la Russie et l’Occident aura définitivement cessé d’exister dans l’imaginaire collectif. La vie de ce pays n’aura jamais été un fleuve tranquille, d’autant que son histoire est émaillée de guerres qui ont fini par installer les Talibans au pouvoir. Il y a d’abord les troupes soviétiques qui combattent les Moudjahidines appelés les « guerriers saints » du 27 décembre 1979 au 15 février 1989. L’invasion soviétique s’inscrivait dans le contexte de la guerre froide. L’URSS voulait appuyer le parti démocratique populaire d’Afghanistan –PDPA- de tendance marxiste qui proclame la «République démocratique d’Afghanistan». Mais, les nouvelles autorités qui se décident à mettre en œuvre de nouvelles réformes (alphabétisation, droit des femmes, réformes agraires) qui permettraient de surmonter le retard de l’Afghanistan, vont se heurter à la résistance des barbus déterminés à maintenir des coutumes conservatrices, ainsi qu’une politique répressive envers les élites et classes moyennes du pays. C’est du Pakistan que partiront alors les tentatives de déstabilisation de ce régime et contre la présence de l’URSS. Ces opérations bénéficient, à partir du 3 juillet 1979, de l’appui des Américains dont le président Jimmy Carter signe la première directive pour aider les islamistes opposés au régime communiste de Kaboul.
Ainsi, conformément aux accords de Genève du 15 avril 1988, Moscou qui ne peut garder longtemps ses alliés locaux au pouvoir, retire ses troupes militaires d’Afghanistan.
La paix revient-elle dans ce pays ? Que non, puisque bien qu’ayant réussi à chasser du pouvoir à Kaboul les Talibans accusés d’avoir accueilli Oussama ben Laden et Al-Qaïda responsable des attentats, les Américains ainsi que leurs alliés vont eux aussi s’enliser.
Pendant une année, soit de 2010-2011, plus de 100 000 militaires américains se déploient en Afghanistan. Mais, le bilan de cet engagement est très lourd: non seulement que plus de 2000 G’I y ont perdu la vie, mais des sommes énormes ont été dépensées pour l’entretien des troupes sur place. C’est ce que le président Joe Biden tient à éviter. Il ne veut plus engager des soldats Us dans les combats à l’étranger. Il préfère, lui, utiliser des drones et des navires de guerre. Il s’est engagé, dit-il, à ne pas transmettre au prochain président américain la « responsabilité de cette guerre ». Il estime que la raison qui avait poussé les Américains à aller en Afghanistan, à savoir: s’assurer que l’Afghanistan ne serve pas de base pour attaquer à nouveau les USA n’existe plus. Il préfère continuer « un travail diplomatique et humanitaire » au bénéfice de ce pays.
Cependant, l’on constate déjà que l’armée afghane ne sera pas en mesure de contrer le retour des Talibans au pouvoir à Kaboul pour y restaurer le régime fondamentaliste qu’ils avaient imposé de 1996 à 2001. La guerre fait rage, et les barbus s’emparent d’importantes villes stratégiques abandonnées par les soldats américains et de l’Otan. Cette crainte est d’ailleurs renforcée par les services de renseignement américains qui ont indiqué, dans un récent rapport, que les autorités de Kaboul ne seraient pas en mesure de résister pendant longtemps face à des insurgés qui n’attendent que le départ des Occidentaux pour revenir au pouvoir.
Nombre d’alliés des États-Unis se disent aussi inquiets quant aux conséquences du retrait de ce pays qui, de l’avis des dirigeants belges, risque de « diminuer la pression sur les Talibans ». Ils croyaient avoir bien fait de soutenir militairement les Talibans pour chasser les Russes de ce pays. A leur tour, les Occidentaux sortent de l’Afghanistan par la petite porte.

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