RDC :Le ministre des finances,Nicolas Kazadi appelé à démissionner !

Par Obed BISIDI

Au lieu d’adopter un profil bas, et de régler ce problème en suivant les normes, Nicolas Kazadi, ministre des Finances a cru bon de faire une fuite en avant, en se servant des médias pour faussement accuser le président de la CENI, Denis Kadima de surfacturation des véhicules destinés aux membres du Bureau de cet organe d’appui à la démocratie. Et ainsi jeter le discrédit sur cette personnalité. Pourtant, l’opinion publique sait que partout où il est passé pour superviser les scrutins électoraux, l’actuel président de la centrale électorale congolaise n’a jamais été accusé d’un quelconque scandale financier. Aujourd’hui, la réalité éclate au grand jour. C’est le ministre des Finances qui a tenté de placer la CENI sous sa tutelle, ce que le Bureau de cet organe a catégoriquement refusé.

L’on sait que la Commission électorale nationale indépendante, appelée CEI jusqu’en mars 2011, est l’une des institutions d’appui à la démocratie  de la République démocratique du Congo créée à la suite de la Constitution de la transition et l’Accord global et inclusif. Cet organisme de droit public congolais est autonome tant administrativement que financièrement. La Commission électorale nationale indépendante a reçu mandat  de garantir des élections libres et démocratiques. A ce titre, le gouvernement a l’obligation de lui allouer des fonds pour lui permettre de bien remplir ses missions, quitte à l’Inspection générale des finances de l’auditer pour vérifier que ces fonds ont été bien utilisés ou pas. 

Mais, dans l’affaire dont il est question, il s’avère que c’est le ministre des Finances qui a tenté de porter atteinte à l’indépendance financière de cet organe, ce qui ne peut être fait au regard de la Constitution régissant la RDC. 

Le ministère des Finances a confié la gestion de tous les fonds de la Ceni au BCeCo, une institution qui fonctionne sous sa gestion. Ce qui n’arrange pas la CENI. D’où l’opposition du président du bureau de cet organe d’appui à la démocratie. Le comportement  du  ministre des Finances de vouloir faire dépendre la CENI du Bceco a été très mal interprétée. “Si le gouvernement avait décidé ainsi, le ministre des Finances devait le dire au président de la CENI. Lors de la prise de ses fonctions, ce dernier aurait indiqué qu’on ne le laisserait pas gérer seul beaucoup d’argent de la CENI”. Ce qui parait suspect. 

Selon le Bureau de la CENI, la somme de 21 millions USD dont parle le ministre des Finances a été débloquée au profit de la CENI le 11 février, après le passage  de Denis Kadima sur Top Congo le 5 février 2022.

De même, ajoute le Bureau de la Centrale électorale, lorsque le ministre des Finances dit avoir versé à la CENI près de 40% des 100 millions USD de la provision constituée en 2021, « il oublie que dans cette quotité, il y a les salaires à payer aux agents, leurs arriérés depuis la fin des élections de 2018 et les frais de fonctionnement de la CENI”, soutient-on.

Concernant la surfacturation des véhicules, les milieux proches de ce Bureau révèlent que c’est le concessionnaire Sokin de l’homme d’affaires libanais Abed Achour qui aurait facturé les Prado TXL à 30 fois plus le prix réel. Bien plus, la société qui devait livrer lesdits véhicules appartiendrait à un membre de la famille de Nicolas Kazadi.  Le Bureau de la CENI est appuyé dans ce sens par l’ODEP qui affirme que l’achat des véhicules pour les membres du bureau de la CENI tel que décidé par le ministère des Finances viole l’article 6 de la loi relative aux marchés publics.

“La surfacturation dénoncée par le ministre des Finances est une conséquence de l’absence de planification et de contrôle a priori. Comment a-t-il ordonné le paiement sans disponibilité des crédits budgétaires, sans appel d’offre”, écrit l’ODEP. Par ailleurs, cette structure accuse le ministre des finances de vouloir violer les textes réglementaires lorsqu’il dit vouloir placer la CENI sous tutelle du BCECO. “ la décision du ministre des finances voulant placer la CENI sous tutelle du BCECO a violé le décret du 28 décembre 2010 portant création, organisation et fonctionnement de la cellule de gestion des projets et des marchés publics au sein de la CENI”.

Volonté de vouloir se servir

L’ODEP note que le recours au BCECO pour effectuer des marchés de la CENI en lieu et place d’une cellule des marchés publics créée au sein de l’organe électoral, sera un facteur déclencheur des rétros commissions, surfacturations, conflit d’intérêt dans le processus d’acquisition du matériel électoral. L’ODEP rappelle “que c’est le BCECO qui a monté tous les marchés sous Corneille Naanga ”, ce qui était déjà anormal. 

Enfin, l’ODEP signale que depuis l’entrée en fonction du nouveau bureau de la CENI, le trésor public a décaissé 212 milliards de FC, soit 104,2 millions de dollars, dont plus de 90% couvre les dépenses de fonctionnement. Pourtant, le ministre des finances a annoncé le 15 février 2022 une mise à disposition de fonds de 37 millions $. Pour cet Observatoire de la dépense publique, entre le versement annoncé par le ministre des finances et ceux retracés par le ministère du budget, il est  constaté un écart de 67,2 millions de dollars, dont la destination reste à démontrer par les acteurs du circuit de la dépense publique.

Pour éviter le désordre que le ministre des Finances cherche à entretenir dans le financement de la CENI, l’ODEP demande au Premier ministre Sama Lukonde de prendre des mesures nécessaires pour garantir à la CENI la jouissance effective de l’autonomie financière conformément aux dispositions de l’article 6 de la loi organique n°10/013 du 28 juillet 2010 portant organisation et fonctionnement de la Commission électorale nationale indépendante telle que modifiée à ce jour.

Car, malgré ses explications, et au regard des accusations dont il est fréquemment l’objet, le ministre des Finances ne se présente plus comme cet oiseau rare dont le chef de l’Etat s’était vanté au début de son mandat. Ceux qui l’avaient présenté comme un homme aux mains propres, venu des institutions financières internationales, serait plutôt, à l’instar de tant d’autres, en train de courir derrière un enrichissement rapide et illicite. 

Si tel n’était pas le cas, Nicolas Kazadi n’aurait pas du tout cherché à placer la Commission électorale nationale indépendante sous les ordres du BCECO, un établissement placé sous sa tutelle. Le chef de l’Etat dont la lutte contre la corruption est son cheval de bataille, devrait tirer les conséquences du scandale qui vient d’éclater au ministère des Finances, et savoir que la transparence dans la gestion des fonds publics ne pourrait être garantie par un ministre sur qui pèsent des soupçons. Il ferait mieux de le décharger au profit d’une autre personnalité à la probité morale et intellectuelle avérée. Ce type d’hommes ne manque pas en RDC.

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