RDC/Point de vue:Le fleuve Congo et ses affluents: des mouroirs

Par Yamaina Mandala

L’absence de l’Etat dans pratiquement tous les domaines, a conduit certains de nos compatriotes à mener des activités lucratives, sans le plus souvent se conformer aux lois et textes réglementaires en vigueur. On peut le dire en ce qui concerne le transport fluvial. Le long du fleuve Congo et ses affluents, des navires souvent dans un état défectueux, font le transport de personnes et de marchandises. Leurs propriétaires disposent des ports privés aussi bien à Kinshasa que dans les provinces traversées par de grands espaces navigables. Cependant, le transport fluvial étant très délicat, les autorités ne semblent pas lui accorder une attention particulière.

Pourtant, on se le rappelle, ce sont les bateaux de l’Office national de transport –ex ONATRA- qui ont rendu, pendant des décennies, d’appréciables services à la population. Que ce soit de Kinshasa à Kisangani, ou dans les affluents; les passagers voyageaient dans des conditions les meilleures.   C’est dire que l’importance et l’attention qui étaient accordées au transport fluvial par les gouvernements de l’époque. Tel ne semble plus être le cas de nos jours.

Cette absence de bateaux de l’ex Onatra est comblée par des armateurs sans vergogne qui ne tiennent généralement pas compte de normes. Ce qui est à la base de nombreux naufrages que l’on déplore à des intervalles réguliers tant sur le trajet qui va de Kinshasa à Kisangani, dans la province de Tshopo, ou sur les  rivières Tshuapa et Kasai. C’est le cas de celui qui s’est produit le 6 octobre 2021 dans la province de Mongala, en localité d’Engengele, dans le territoire de Bumba, à plusieurs encablures de la rivière Itimbiri.

Il y a quelques années, j’avais accompagné une délégation de 5 ministres dépêchés par le gouvernement central dans la ville de Boende, chef-lieu de la province de Tshuapa, où un naufrage dans la rivière du même nom, avait causé d’importants dégâts matériels et de pertes en vies humaines:  c’est avec un pincement au cœur que l’on suivit les témoignages de rescapés dont des femmes, des enfants et des biens avaient été emportés nuitamment par les eaux. Tous accusaient le Commissaire fluvial. Pourtant, ces cadres du ministère des transports et voies de communication avaient suivi,  à Kinshasa, une formation devant les aider à mieux remplir leurs missions sur les points d’attache. Rien n’y fait. L’on constate même que la situation  ne fait qu’empirer.

Il y a encore des années, nous avions déploré au port de Mbandaka, dans la province de l’Equateur, la présence de petits bateaux surchargés de passagers et de marchandises qui attendaient la tombée de la nuit pour prendre le large. Là aussi, le Commissaire fluvial avait été interpellé pour son insouciance et le non-respect des règlements régissant le transport fluvial.

Très souvent, les gouverneurs sont accusés  de protéger les commissaires fluviaux, ce qui empêche les ministres provinciaux des transports et voies de communication de les sanctionner en cas de fautes disciplinaires. 

Ainsi, pour des intérêts mesquins, de nombreux armateurs qui paient d’ailleurs difficilement leurs redevances à l’Etat, des gouverneurs de province, et bien entendu, des commissaires fluviaux, laissent des hommes, des femmes et des enfants se noyer la nuit dans des eaux souvent agitées sans espoir d’en sortir vivants.

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