RDC:justice/ Problématique de l’affaire Matata, la cour de cassation sur le point de contredire son parquet ?

Par Pius Romain Rolland

L’affaire Matata Ponyo et consorts défraie la chronique judiciaire en République Démocratique du Congo. De la Chambre haute du Parlement aux différentes juridictions, le dossier Matata Ponyo renvoie plusieurs praticiens de droit aux études.
La loi fondamentale, notre Constitution n’a conféré aucune juridiction au Président de la République honoraire, moins encore au Premier Ministre honoraire.
Force est de rappeler, que la Cour de Cassation est la juridiction compétente de juger que les membres de l’Assemblée nationale, du sénat ; les membres du Gouvernement autres que le Premier Ministre ; les membres de la Cour constitutionnelle ; les magistrats de la Cour de Cassation ainsi que du Parquet près cette Cour; les membres du Conseil d’Etat et les membres du Parquet près ce Conseil ; les membres de la Cour des comptes et les membres du parquet près cette Cour; les Premiers présidents des Cours d’Appel ainsi que le Procureurs généraux près ces cours; les premiers Présidents des cours administratives d’Appel et les procureurs près ces cours, les Gouverneurs, les Vice-gouverneurs de province et les ministres provinciaux, enfin les Présidents des Assemblées provinciales. Ces personnalités sont celles qui sont à la disposition de la Cour de Cassation en cas d’infraction de droit commun. Le Premier Ministre qu’il soit en fonction où honoraire ne répond pas de cette juridiction. A moins de réviser les dispositions constitutionnelles et lui donner la compétence de poursuivre le Président de la République honoraire et le Premier Ministre honoraire.
Dans le cas présent, ils n’ont pas de juridiction qu’il soit la Cour Constitutionnelle ou la Cour de Cassation.

Curieux que cela puisse paraître, dans l’affaire Matata Ponyo, pendant qu’il était en fonction, aucun dossier judiciaire n’a jamais été ouvert à sa charge dans l’affaire Bukanga Lonzo. Même pendant que ses trois succeurs ( Samy Badibanga, Bruno Tshibala et Sylvestre Ilunga Ilukamba) assumaient leurs fonctions.
Le rebondissement de ce dossier fait suite aux enquêtes biaisées de l’IGF, qui, dans son rapport écarte délibérément un engin pourtant présent au lieu enquêté dans le seul but de charger l’ancien Premier Ministre Augustin Matata Ponyo des faits imaginaires.

Malgré la controverse des enquêtes de l’IGF qui n’ont jamais confrontées l’incriminé, le Procureur Général près la Cour de Cassation dans un réquisitoire adressé au Sénat, sollicite la levée des immunités aux fins d’entendre le Sénateur Matata Ponyo dans l’affaire Bukanga Lonzo, ce qu’il n’avait pas obtenu malheureusement. Par malice, contourne l’affaire pour le cueillir dans l’affaire zairianisation. Dans cette affaire, il obtient la levée des immunités, mais l’entend plutôt dans l’affaire Bukanga Lonzo où l’ancien Premier Ministre garde ses immunités parlementaires. Devant les évidences juridiques, le Procureur Général près la Cour de Cassation s’avère incompétent de juger l’ancien Premier Ministre, de lui même, il transmet le dossier à la Cour constitutionnelle. C’est ce qui ressort de la conclusion du Procès verbal de la plénière des magistrats du Parquet Général près la Cour de Cassation présidée le 18 mai 2021 par Monsieur le Procureur Général près la Cour de Cassation. Laquelle conclusion dit exactement ce qui suit : il a été adopté par la plénière que, c’est le Procureur Général près la Cour Constitutionnelle qui est compétent pour instruire un dossier des faits relevant de la Cour Constitutionnelle. Par conséquent, le Procureur Général près la Cour de Cassation est incompétent pour instruire l’affaire mettant en cause Matata Ponyo, étant entendu que les faits ont été commis quand il exerçait les fonctions du Premier Ministre. Telle est la position que le Parquet Général près la Cour de Cassation a dégagé. Pour rappel, ce procès verbal avait été signé par Monsieur Bakubi Kilanga Médard, Secrétaire Rapporteur.

Après s’être déclaré incompétent d’instruire le dossier contre Matata Ponyo dans l’affaire Bukanga Lonzo, il transmet le dossier à la Cour constitutionnelle du fait de son incompétence.

Cette dernière instruit le dossier, malgré que Matata Ponyo garde ses immunités parlementaires dans l’affaire Bukanga Lonzo, celui ci comparaît devant elle. En droit, il y a un principe sacro-saint : tant que la forme n’est pas vidée, on attaqué pas le fond.

C’est quoi la forme dans cette affaire? C’est la juridiction de l’ancien Premier Ministre.
Première juridiction qui se déclare incompétente est le Parquet près la Cour de Cassation. Il ne reste que la Cour de cours. Elle est juge de l’exception d’inconstitutionnalité soulevée devant ou par une juridiction. Elle est la juridiction pénale du Chef de l’Etat et du Premier Ministre dans les cas et conditions prévus par la Constitution ; pour des infractions politiques de haute trahison, d’outrage au Parlement, d’atteinte à l’honneur ou à la probité ainsi que pour les délits d’initié et pour les autres infractions de droit commun commises dans l’exercice de leurs fonctions. Elle est également compétente pour juger leurs co-auteurs et complices. Ces dispositions tiennent les juges du Président en fonctions et le Premier Ministre en fonction car, une fois reconnus coupables, ils sont déchus de leurs fonctions et mis à la disposition de la justice pour condamnation.
A ce propos, la Cour Constitutionnelle gardien des lois de la République se déclare incompétente de juger celui qui n’est pas en fonction, ni n’ayant pas un dossier judiciaire pendant dans cette affaire.
Elle conclut par l’application de l’article 168 de la Constitution : les arrêts de la Cour Constitutionnelle ne sont susceptibles d’aucun recours et sont immédiatement exécutoires. Ils sont obligatoires et s’imposent aux pouvoirs publics, à toutes les autorités administratives et juridictionnelles, civiles et militaires ainsi qu’aux particuliers. Tout acte déclaré non conforme à la Constitution est nul de plein droit.

Par cette disposition constitutionnelle qui a mis fin au dossier Matata Ponyo par manque de juridiction au moment de la commission des faits, aucune autre juridiction, ni le Président de la République, ni le Premier Ministre en fonction, ni le Procureur près la Cour de Cassation ne peut se substituer à cette décision. Le fait que le Procureur Général près la Cour de Cassation réinstruit le dossier pour lequel il s’était déclaré incompétent suivant le procès verbal de la plénière présidée par lui constitue une violation manifeste de la Constitution et s’oppose par ricochet à la décision de la Cour Constitutionnelle. Ne peut comparaître dans cette affaire,m et être entendu, c’est le Procureur Général près la Cour de Cassation qui s’oppose à la Constitution et à la Cour constitutionnelle. Sa démarche consiste à créer une jurisprudence dans cette affaire. Laquelle jurisprudence n’épargnerait l’actuel Chef de l’Etat après ses fonctions.

Dossier à suivre

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