Voici les recommandations de l’ONG Lucha au chef de l’Etat Félix Tshisekedi

Notre cahier des charges et ses annexes s’articulent autour de trois axes : la sécurité, la justice et la diplomatie ; la gouvernance économique et sociale ; les réformes institutionnelles et électorales. En voici un résumé:
I. SECURITE, JUSTICE, ET DIPLOMATIE 1. Instaurer une Police de Proximité dans la ville et le territoire de Beni constituée des jeunes qui connaissent bien le milieu et qui ont un intérêt immédiat dans la protection de leurs familles, leurs maisons/villages, et des biens de tous les citoyens. Ces unités feraient l’objet d’une formation accélérée, d’un vetting méticuleux, et seraient placées sous le commandement de l’Inspection provinciale de la Police L U C H A 2 nationale Congolaise. Leur doter de moyens (armes, uniformes, moyens de communication) adéquats et assurer leur prise en charge efficace. Ainsi, alors que l’armée continuerait ses opérations, cette Police de Proximité assurerait le rôle de protection des civils en aval pour dissuader et répondre à d’éventuelles attaques. Nous sommes disposés à soutenir et participer directement à ce mécanisme. 2. Ecarter les officiers criminels et affairistes au sein des FARDC, de la police et de l’ANR et les mettre à la disposition de la justice afin qu’ils répondent de leurs actes. De même, cesser de soutenir ou d’utiliser des groupes armés (proxy) pour quelque raison que ce soit. En effet, il est insensé d’espérer gagner la guerre contre les groupes armés alors que nos propres forces de défense et de sécurité sont infestées de criminels, ou qu’elles collaborent avec ceux qu’elles sont censées combattre. 3. Veiller à ce que les auteurs Congolais et étrangers des massacres passés et actuels à travers le pays soient déférés devant la justice et jugés, en instruisant le ministère des affaires étrangères d’adresser une demande formelle au Conseil de Sécurité pour l’institution d’un tribunal pénal international pour le Congo pour juger les auteurs de niveau supérieur et les auteurs étrangers, et en relançant le projet d’institution de Chambres Mixtes Spécialisées pour juger les auteurs Congolais de niveau intermédiaire et inférieur. Simultanément, décréter et faire observer une Journée nationale de commémoration des victimes des crimes internationaux perpétrés en RDC et faire ériger des sites mémoriaux dignes de ce nom à travers le pays afin de perpétuer et transmettre la mémoire des victimes. 4. Mettre en œuvre un programme de démobilisation, désarmement et réinsertion basé sur les expériences du passé : hormis l’accent que vous mettez désormais à juste titre sur une « approche communautaire », cesser avec la politique d’intégration, de gratification et d’amnistie pour les membres des groupes armés et les traitres à la nation car au lieu de promouvoir la paix, elle sert plutôt de stimulus pour perpétuer les conflits et la violence armée. En outre, le programme DDR a besoin d’un leadership volontariste et d’une coordination sans faille afin de canaliser les efforts et les moyens de tous les partenaires, de rassurer les combattants qui acceptent de déposer les armes, et d’emporter le soutien des populations dans les zones concernées. 5. Mener une politique régionale et une diplomatie clairvoyante, dénuée de fauxsemblants et de soumission aveugle aux desiderata des puissances régionales et internationales. Le respect de notre souveraineté et de notre intégrité nationale ne peut pas se quémander, il doit se mériter. Il faut concentrer les efforts sur les réformes et la discipline de nos forces de défense et de sécurité, leur dotation en moyens adéquats, la maîtrise des effectifs, la prise en charge des militaires, policiers, démobilisés, blessés et handicapés de guerre et leurs familles… puis sur le contrôle effectif de nos frontières. Il faut exiger le départ des forces étrangères (Zambiennes, 3 Rwandaises, Ougandaises, Sud-Soudanaises et autres) qui opèrent sur notre territoire. Il faut arrêter de tolérer les immixtions et le mépris affiché par certains diplomates étrangers à l’égard de nos institutions et de notre pays, et notamment expulser ou exiger le rappel de l’actuel ambassadeur du Rwanda à Kinshasa pour les raisons que nous avons eu à démontrer. 6. Être plus exigeant envers la MONUSCO quant à sa performance au regard de son mandat, mais en même temps lui faciliter la tâche aussi bien sur le plan politique que sur le plan opérationnel. Négocier un plan de sortie de la MONUSCO en mettant l’accent sur le transfert des compétences et des ressources, notamment en matière de formation et d’équipement de la Police de Proximité dans les zones en et post-conflit, ainsi que sur le respect des droits du personnel Congolais de la Mission. II. GOUVERNANCE SOCIALE ET ÉCONOMIQUE 7. Assainir, exiger et créer les conditions pour que le secteur extractif Congolais (mines, pétrole, bois…) crée plus de valeur-ajoutée locale, soit un vecteur d’acquisition de compétences pour les jeunes Congolais, soit plus transparent, et réduise son impact négatif sur l’environnement. Appliquer des standards élevés pour responsabiliser les entreprises, notamment minières et forestières, en matière de protection et de restauration de l’environnement. 8. Réaliser l’engagement de relancer la MIBA et d’autres sociétés publiques qui étaient jadis les fleurons de notre économie. 9. Redoubler d’efforts pour combattre la corruption, les détournements et leurs corollaires, et éviter de donner le sentiment qu’il y a deux-poids deux-mesures dans la mise en œuvre de la justice. S’assurer que des suites satisfaisantes sont données dans les enquêtes sur la Gecamines/Albert Yuma, le dossier Bukanga Lonzo, le dossier de la fibre optique, le dossier des passeports, l’affaire de 15 millions, la gestion des épidémies d’Ebola et de COVID-19, le dossier GO-pass, la rénovation de l’aéroport de Ndjili, les détournements au sein des sociétés Transco et Congo Airways, etc. 10. Réduire le coût de fonctionnement et le train de vie des institutions y compris la présidence, en réduisant sensiblement le nombre et le barème de rémunération des personnels politiques et administratifs, la taille du gouvernement et des cabinets ministériels, la taille des conseils d’administration des entreprises et établissements publics, des gouvernements provinciaux, etc. Veiller à une gestion orthodoxe des finances publiques, notamment en évitant et en sanctionnant les dépenses en procédure d’urgence, les dépenses extra-budgétaires, les dépassements ; en réduisant le recours aux marchés de gré à gré conformément à la loi en la matière… 4 11. Supprimer les structures/agences non essentielles qui dépendent de la présidence et cesser d’en créer d’autres à tour de bras, mais plutôt évaluer et prendre des décisions qui vont dans le sens d’améliorer la performance des services et des structures existantes de par la loi. Communiquer sur le statut, le rôle et le budget du « bureau de la Première Dame » et veiller contre les conflits d’intérêt. 12. Instruire le gouvernement de revenir sur sa décision d’instaurer une taxe ridicule sur les appareils mobiles et veiller à la suppression des taxes qui asphyxient l’activité économique et l’investissement, principalement pour les Congolais dans les secteurs formel et informel. 13. S’assurer que les institutions provinciales et les entités locales travaillent sans empiétement du gouvernement central sur leurs attributions légales, que le principe de la retenue à la source de 40% des recettes est appliqué, et que le choix des dirigeants locaux en attendant les élections locales soit dicté non pas par des considérations politiques, tribales et/ou clientélistes, mais par le besoin de compétence et de dévouement pour répondre aux préoccupations des citoyens à la base. Faire cesser les immixtions de la présidence et du gouvernement dans la gestion quotidienne des provinces et cesser de cautionner des dirigeants incompétents ou déchus comme au Kongo Central, au Kasaï Oriental, dans le Sud-Ubangi, au Kasaï, en Ituri, au Kwilu et partout ailleurs. III. LES RÉFORMES INSTITUTIONNELLES ET ELECTORALES La crise renforcée par le simulacre d’élections de décembre 2018 peut être résorbée à travers la mise en place des réformes courageuses. 14. CENI : soutenir une dépolitisation pure et simple de la CENI, avec des animateurs recrutés uniquement sur des critères de compétence, d’expérience et d’intégrité ; qui soient indépendants de tout parti ou personnalité ou courant politique, et qui soient pénalement responsables de leurs actes de gestion du processus électoral. 15. Révision de la Constitution et de la loi électorale : soutenir le retour de l’élection présidentielle à deux tours, rendre obligatoire la tenue des élections à une période fixée à l’avance et édicter les conséquences en cas de refus ou d’échec à tenir cette exigence ; supprimer le seuil et revoir la question de la caution, renforcer les exigences pour être candidat, moraliser la vie publique en interdisant notamment les suppléances de complaisance et les mandats multiples, amener l’élection des gouverneurs au suffrage universel direct, réduire le nombre de sièges à l’assemblée nationale, etc. (Voir notre mémo spécifique). 16. Justice : procéder à de nouvelles mises en place au sein du Pouvoir judiciaire dans le but non pas d’y avoir sa mainmise, mais de renforcer son indépendance et sa crédibilité avec des magistrats consciencieux. Veiller à ce que le pouvoir judiciaire 5 reçoive des moyens conséquents pour fonctionner, y compris dans les zones reculées, et que les personnels soient payés correctement.

Kinshasa, le 5 novembre 2020
Pour la LUCHA, La Cellule de Communication

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